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Algérie-France : comprendre le passé pour mieux construire l’avenir 5

jeudi 26 février 2015, par Collectif.


Source http://www.senat.fr/ga/ga105/ga1056.html

CLÔTURE Claude DOMEIZEL, Sénateur, président du groupe interparlementaire d’amitié France-Algérie

Monsieur le Premier ministre,

Messieurs les Ambassadeurs,

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

Chers amis,

Nous voilà arrivés au terme d’une journée de débats denses, riches, parfois mouvementés, souvent émouvants. Merci à tous les intervenants pour leurs communications pertinentes et leur participation à ces débats. Ma gratitude va à tous les historiens, écrivains, journalistes, anciens ambassadeurs, responsables politiques, et particulièrement aux animateurs des tables rondes et aux intervenants qui ont fait le déplacement d’Alger, de Constantine ou d’Oran, et, pour certains, des États-Unis, pour être avec nous aujourd’hui.

Mes remerciements vont aussi à tous les participants venus si nombreux. Je tiens aussi à exprimer ma gratitude au Sénat pour nous avoir accueillis et à son personnel très diligent, notamment la direction de l’accueil et de la sécurité et la direction des relations internationales. Je remercie enfin Ben Salama pour nous avoir donné l’autorisation de diffuser des séquences de son excellent documentaire.

Cinquante ans après l’indépendance algérienne, le temps est venu de regarder l’histoire en face et de tenter, pour autant que cela soit possible, de réconcilier les mémoires. Certains ont craint qu’une telle commémoration puisse être l’occasion de ranimer des polémiques inutiles. Je ne l’ai jamais cru et, globalement, l’atmosphère sereine et concentrée dans laquelle se sont tenues nos réflexions tout au long de la journée. Sommes-nous capables de remuer les démons du passé sans que les passions se déchaînent et sans risquer que « le diable sorte de la boîte » ? Oublions le court moment un peu fébrile qui a émaillé notre journée... et répondons « oui » à cette question.

Une chose est sûre : le groupe d’amitié France-Algérie du Sénat ne pouvait pas rester inactif en de telles circonstances. Et le fait que vous soyez venus si nombreux assister à cette journée prouve la puissance de ce lien indéfinissable, et pourtant si palpable, qui existe entre l’Algérie et la France et que Jean-Pierre Chevènement appelle « l’identité franco-algérienne ». Ce lien, qui transcende nos appartenances nationales, a été tissé au cours de nos 132 ans d’histoire commune, et renforcé ces cinquante dernières années par les relations humaines si denses qui se sont forgées entre nos deux peuples et dont la trame de la population française est aujourd’hui le reflet.

Notre journée de réflexion fut ainsi l’occasion de rappeler quelques évidences : quels que soient les apports de la France en Algérie - et il y en eut évidemment, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain - rien ne pouvait justifier le traitement que la France coloniale a réservé à ceux que nous appelions à l’époque les « indigènes » ou les « musulmans ». Dès lors que l’immense majorité de la population était reléguée dans un statut politique, économique, social et culturel inférieur, interdite d’accéder à la pleine citoyenneté, alors la France était en contradiction avec ses idéaux républicains et l’idée même d’une « Algérie française » était compromise dans ses fondements. Tant que l’immense majorité de la population était de jure et de facto exclue de la vie politique et citoyenne nationale, alors l’idée d’une nation algérienne ne pouvait qu’exploser parmi la population dite musulmane et il était vain de parler d’égalité et d’unité nationale. Le respect de la dignité humaine est le premier socle de nos valeurs et le fondement du sentiment d’appartenance nationale. Je crois qu’il était important aujourd’hui de le rappeler.

Je voudrais aussi saisir l’occasion de ce colloque pour m’adresser au Président de la République française. Il est dans mon rôle de président de groupe d’amitié de lui dire combien il est important d’être clair sur le sujet de l’Algérie. Beaucoup de nos compatriotes attendent des mots d’apaisement et de réconciliation. Nombreux sont, parmi nos concitoyens, ceux dont l’histoire personnelle a été bouleversée par la grande Histoire tumultueuse : pieds noirs, anciens appelés, Français issus de l’immigration algérienne, harkis.

Juste une parenthèse à propos des harkis : j’ai été, pendant ma carrière professionnelle, enseignant dans un camp de harkis et j’ai eu la chance et l’honneur de répondre à leur soif de savoir. Je continue à m’adresser à eux pour faciliter aujourd’hui l’intégration des enfants et petits-enfants.

Toujours au sujet des harkis, je souhaite rappeler ce que François Hollande disait le 6 avril dernier : « La mémoire des harkis est une mémoire vive et souffrante. Elle impose à la France un retour sur elle-même et sur son histoire. »

Nos amis algériens attendent également un message de la France. Pas une repentance, pas une contrition. Simplement une reconnaissance des erreurs que nous avons pu commettre. Et je salue à cet égard les mots que le candidat à la présidence de la République a prononcés durant sa campagne, je le cite : « Il faut que la vérité soit dite. Sans repentance ni mise en accusation particulière. Reconnaître ce qui s’est produit ».

Souvenons-nous. Un premier pas avait été franchi en 2005 à Sétif, par l’ambassadeur de France en poste à l’époque, M. Hubert Colin de Verdière, qui avait évoqué, au sujet des massacres du 8 mai 1945, une « tragédie inexcusable ». Je crois qu’il est temps aujourd’hui de franchir une nouvelle étape et que ces mots soient prononcés par le premier personnage de l’État.

Cinquante ans se sont écoulés depuis l’indépendance de l’Algérie. Il n’est nul besoin d’attendre un geste symétrique des autorités algériennes pour que la France choisisse d’assumer aujourd’hui ses responsabilités. C’est important d’entendre la voix de la France dire les choses telles qu’elles sont, parce que les conséquences en seront considérables au niveau international comme au niveau national.

Au niveau international d’abord, la vérité partagée peut seule fonder la réconciliation historique entre la France et l’Algérie. Elle ouvrira une nouvelle page dans la relation entre nos deux pays. Cette nouvelle page peut, elle-même, préfigurer un futur espace de paix et de prospérité en Méditerranée occidentale, dans le cadre d’une Union pour la Méditerranée rénovée et revivifiée dont plusieurs pistes, cet après-midi, ont dressé les contours. Il y a tant à faire ! Les bouleversements qu’ont connu et que continuent de connaître nos voisins d’outre-Méditerranée rendent la tâche encore plus urgente.

Au niveau national ensuite, la lucidité sur son passé est le fondement de la réconciliation de la France avec elle-même. Parce que les liens humains n’ont jamais été rompus avec l’Algérie, ils se sont mêmes renforcés avec le temps ; la France bénéficie aujourd’hui de la présence de très nombreux Français d’origine algérienne. Vous tous ici êtes l’image vivante de cette France diverse, qui est le produit de notre histoire. A ces Français qui sont une force vive et un facteur de dynamisme essentiel pour notre pays, nous devons tenir un discours de vérité, car lui seul leur permettra d’assumer leurs identités multiples sans risquer la schizophrénie.

Mais quelque chose me dit que le moment est proche. Et que la réalité d’un partenariat renouvelé bâti sur des bases sereines et purgé d’un passé mortifère est pour bientôt. Alors, enfin, nous pourrons libérer l’avenir pour nous tourner vers un nouveau destin commun. C’est en tout cas mon espérance ce soir. Et je conclurai en citant à nouveau François Hollande : « La France se grandit en reconnaissant ses fautes. La France du XXIe siècle que je souhaite construire avec tous les Français a besoin d’une mémoire apaisée. »

Puissent ces quelques instants passés ensemble y avoir contribué. Je vous remercie.

Pour prendre connaissance de la biographie des intervenants, cliquer sur la vignette ci-dessous :

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Biographie des intervenants
Algérie-France : comprendre le passé pour mieux construire l’avenir 5

1 Message

  • Bonjour, Vous ne trouvez pas que la tâche est difficile. Les "fautes" commises à l’époque, (durant 132 ans) étaient avant tous des fautes diplomatiques au service de la métropole, qui tenaient compte du contexte du moment. Le pouvoir parisien décidait et les français habitants l’Algérie exécutaient le sale boulot et, qui dans le même temps concernaient les Algériens. Je pense qu’il vaudrait mieux parler au présent, de la politique à mener plutôt qu’au passé. Jules Ferry à tenu des propos qui ont été récemment discrédités par le Président de la République. C’est de l’hypocrisie, c’est parler pour ne rien dire, car ce que nous faisons et disons aujourd’hui sera probablement critiqués dans 100 ans pour des raisons que j’ignore actuellement.


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