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HUIT JOURS EN KABYLIE Ὰ TRAVERS LA KABYLIE et LES QUESTIONS KABYLES

samedi 27 juin 2015, par François CHARVERIAT

Ces notes, réunies pour mon compte personnel en 1887, ne devaient être communiquées qu’à mes compagnons de voyage. Si je les publie aujourd’hui, c’est qu’en les relisant j’y trouve des points d’un intérêt général.

L’Algérie, particulièrement la Kabylie, est trop peu connue en France, ou plutôt, ce qui est pire, imparfaitement connue.

J’espère avoir vu certaines choses telles qu’elles sont, et pouvoir, par conséquent, présenter quelques questions sous leur véritable jour.

Deux nouveaux voyages en 1888 n’ont fait que confirmer les observations et les renseignements que j’avais antérieurement recueillis.

Alger, le 5 mars 1889.


Un ouvrage passionnant écrit par François Charvériat, publié en 1889 et réédité par Miages-djebels. Une synthèse remarquable des difficultés rencontrées et des mentalités du moment. Un ouvrage tonique pour décrypter le passé et comprendre le présent.

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HUIT JOURS EN KABYLIE Ὰ TRAVERS LA KABYLIE et LES QUESTIONS KABYLES
Un ouvrage passionnant écrit par François Charvériat,
(1854-1889)
Agrégé des facultés de droit, professeur à l’école de droit d’Alger

Conclusion :

LA KABYLIE

Sous le rapport physique, la Kabylie mérite, à beaucoup d’égards, d’attirer les touristes. Peu de contrées offrent, en effet, à côté de lieux rappelant les plus beaux endroits de la France, des sites d’un cachet aussi particulier. Le Djurdjura vaut mainte chaîne célèbre des Pyrénées et des Alpes. Les forêts de l’Akfadou peuvent se comparer aux magnifiques futaies des environs de Paris. Quant à la vue de Fort-National, au panorama de l’Azerou-n’Tohor, à l’aspect général du pays kabyle, avec ses villages perchés sur chaque piton, ses réseaux de profonds ravins, ses cultures et ses arbres suspendus aux flancs de montagnes presqu’à pic, rien ne peut servir de terme de comparaison. La Kabylie est une région absolument unique en son genre, et qu’il faut voir soi-même si l’on veut s’en faire une idée exacte.

La population de ce curieux pays est encore plus curieuse que le pays lui-même. C’est une race antique, constituée des débris de peuples disparus. Vaincue après une résistance héroïque, mais non soumise, elle conserve toujours l’espoir d’une revanche, et se défend encore avec une obstination sourde, mais indomptable. Sa religion, ses coutumes, sa langue, elle s’en sert comme d’un rempart pour arrêter, au seuil de la famille, l’invasion étrangère. Les efforts que l’on fait pour l’assimiler semblent même accroître l’opiniâtreté de sa résistance.

Le Kabyle n’est pas seulement passionné pour l’indépendance. À cet amour de la liberté, qui est la marque des vrais caractères, il joint des qualités propres aux grandes nations. Il se montre sobre, travailleur et industrieux. Il sait arracher sa subsistance à un sol ingrat et, en cas de nécessité, aller au loin gagner sa vie, comme l’Auvergnat et le Savoyard ; il a presque toutes les vertus du paysan français.

Je rapporte de mon voyage, avec une plus grande admiration pour la Kabylie et les Kabyles, une idée moins imparfaite, je le pense, des obstacles que rencontre la civilisation, et des espérances qu’il est permis de concevoir. J’ai vu s’accroître et se préciser le nombre et l’importance des questions à résoudre. Au milieu de renseignements et d’avis souvent contradictoires, j’ai eu grand’peine à me faire une opinion, et encore sur quelques points seulement. J’ai pu rectifier certaines appréciations que j’avais antérieurement hasardées .

Ce que je puis surtout affirmer, c’est qu’il y a encore beaucoup à faire en Kabylie. Pour être bien connu, ce pays demande des études approfondies ; j’espère qu’elles seront bientôt entreprises. Mais si l’on veut vraiment parvenir à la vérité, il faut absolument renoncer aux partis pris, observer même ce qui peut déplaire, regarder en face les choses et les hommes : en Kabylie il faut voir le Kabyle, et le Kabyle tel qu’il est.

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AVANT-PROPOS

Ces notes, réunies pour mon compte personnel en 1887, ne devaient être communiquées qu’à mes compagnons de voyage. Si je les publie aujourd’hui, c’est qu’en les relisant j’y trouve des points d’un intérêt général.

L’Algérie, particulièrement la Kabylie, est trop peu connue en France, ou plutôt, ce qui est pire, imparfaitement connue.

J’espère avoir vu certaines choses telles qu’elles sont, et pouvoir, par conséquent, présenter quelques questions sous leur véritable jour.

Deux nouveaux voyages en 1888 n’ont fait que confirmer les observations et les renseignements que j’avais antérieurement recueillis.

Alger, le 5 mars 1889.


Table des matières :

- CHAPITRE I LE DÉPART. TIZI-OUZOU, FORT-NATIONAL ET AÏN-ELHAMMAM. PROPRIÉTÉ, IMPOTS, IDÉES POLITIQUES DES KABYLES. Lundi 20 juin 1887. - Compagnons de voyage, chemin de fer de l’Est-Algérien, la Métidja. - Entrée en Kabylie, diligences algériennes. - Haussonviller. Mardi 21 juin 1887.- Tizi-Ouzou, la Kabylie. - Départ pour FortNational. Le Sébaou, l’Oued Aïssi. - Le Djurdjura. Huileries de Tak-Sebt et de Makouda. La montée, le climat. - L’agriculture kabyle, le béchena, les frênes. - La vigne. Morcellement de la propriété.- Propriété individuelle et indivise chez les Arabes et les Kabyles. - La route ; maisons et villages. - Les enfants kabyles, donar sourdi, le drapeau de la France. - École de Tamazirt, le Djurdjura, maison de deux grands chefs kabyles. - Village d’Azouza, Fort-National. - Insurrection de 1871. Le fort, la garnison. La répression, l’amiral de Gueydon ; les confiscations, les colons. - Les Kabyles, leur costume. - La marché kabyle. - Le Djurdjura. 5 Le père La Verte et la route d’Aïn-el-Hammam. - La tribu des Beni-Yenni et ses écoles. Village de Tashenfout. - Aïn-el-Hammam. Densité de la population, colonisation impossible. - La commune mixte, les fonctionnaires, l’administration, la justice, le bordj. - Vue qu’on a d’Aïn-el-Hammam. - Une pépinière. - Climat. Coucher du soleil. Voyage en Kabylie de M. Berthelot, ministre de l’instruction publique. Un voyage officiel. - Suppliques des Kabyles, les galettes. La lezma, impôt de capitation ; plaintes exagérées.- Répartition de la lezma ; réforme possible. - Autres impôts. - Le tirailleur algérien. - Ressources des Kabyles ; l’usure. - Égalité démocratique, ses causes. - Idées des Kabyles sur le pouvoir. - Beauprêtre. - La justice et la clémence. - Idée que les Kabyles se font de la République, Madame Poublique.- Le Beylik. - Les routes. Prestige de l’uniforme. - Résistance des Kabyles aux coups et blessures. - Plan pour le lendemain.

- CHAPITRE II ASCENSION DE L’AZEROU-N’TOHOR. VILLAGE DE TIFERDOUL. MOEURS ET COUTUMES DES KABYLES ; GUERRES CIVILES. ASSIMILATION. Mercredi 22 juin 1887. -Le matin. À mulet ; en route pour l’Azeroun’Tohor.- Un cavalier d’administration. - Sangliers et panthères. Femme voilée.- Le chemin, la Maison Cantonnière, le refuge. - Tirourda et Taklelidjt-n’Aït-Atchou. - Col de Tirourda ; nombre des passants, les troupeaux. - Panorama du col de Tirourda. - Le déjeuner. Les Roumis. - La télégraphie kabyle ; perquisitions impossibles. - Le ramadan et la lune. - Le sommet de l’Azerou-n’Tohor. – Panorama ; altitude ; les cartes. - Le sorbet, la chute des corps. Village do Tiferdoul. - La djemâa et le self-government.

  • La kharouba (famille), le thaddert (village), le douar (tribu, gens). Le tamen, l’amin et l’oukil, l’amin-el-oumena (caïd). - Embarras de l’administration française ; les çofs.
  • La race berbère. - La mosquée. - Porteuses d’eau. - Costume des femmes kabyles ; leurs ornements suivant le sexe de leurs enfants ; leurs tatouages. - Les femmes à la fontaine, les jeunes filles. - Un marabout. Maisons kabyles. Les croix grecques ; les Kabyles ont-ils été chrétiens ? - La propreté des maisons et des gens. Costume - Métier à tisser. Maîtresses et servantes. Le couscous. L’amin de Tiferdoul. Retour à Aïn-el-Hammam. - Bijoux kabyles. Guerres entre villages, assassinats. - Crainte inspirée par les Français. Les juifs. La vendetta. - La rek’ba, la peine du talion. - Assassins de profession. - Répression illusoire des crimes. La peine de mort, la décollation, le droit de grâce. -Solidarité entre Kabyles. Responsabilité collective.
  • Arrestations collectives. - Obéissance fataliste. - Peines de l’indigénat. - Arrestation verbale, la Carta. - Emprisonnement fictif. Prestige de l’autorité basé sur la force.
  • Assimilation. Les Kabyles restent nos ennemis, surtout les tirailleurs indigènes. - Singulier essai d’assimilation.
  • Système électoral. - Les communes de plein exercice.
  • Caisse syndicale des thadderts. - Le chapeau haut de forme ; conseils de cuisine ; la Marseillaise et l’eau de Lubin. - L’essai échoue. - Ce qu’il faut penser de la naturalisation en bloc des habitants et de la fidélité des troupes indigènes. - Les indigènes au Tonkin ; les indigènes musulmans haïssent la France. - De leur naturalisation ; la religion. - Les Kabyles sont plus rapprochés des Européens que les Arabes. -Les orphelins du cardinal Lavigerie.

- CHAPITRE III TAKA, LE SEBAOU, AZAZGA. - L’INSTRUCTION, LA FEMME MUSULMANE. LES COLONS. Jeudi, 23 juin. Adieu au Djurdjura. En route pour Azazga. - Race kabyle, son origine, ses éléments, sa langue. - Les Beni-Fraoucen. - Les marabouts. 61 L’école primaire d’Aït-Hichem. - Les instituteurs et institutrices en Kabylie, leur mission. - L’enseignement secondaire, l’instruction primaire obligatoire. - Résistance des indigènes. - Palmes académiques données à des chefs kabyles. Méthode d’instruction, singularités : les remords de Frédégonde, la liste des ministères, etc. - Le Coran et la mémoire ; atrophie intellectuelle du musulman. - Inutilité et danger de l’instruction donnée aux indigènes. - Instruction des filles. - « C’est un meurtre. » - Problème de l’enseignement professionnel.

Ecole de Djemâa-Saharidj ; les Jésuites en Kabylie. - Le chanfrère. Les Pères Blancs et les Soeurs Blanches. Difficulté des conversions. - Enseignement laïque des Pères Blancs et des Soeurs Blanches. « La selle », le barda. - Village de Taka. - Cimetière. L’orfèvre kabyle ; bijoux indigènes. - Négociations ; les agrafes. - Un nom écrit. - Chemins et mulets ; descente. Vallée du Sébaou. - Le soleil, les burnous. Valeur vénale de la femme d’un sidi professeur. - Le mariage kabyle ; vente de la femme, sa valeur vénale ; répudiation ; veuve plus chère que la jeune fille. - La polygamie successive. - Femme d’été et femme d’hiver. - Situation de la femme musulmane, son abjection. - Ce que devient la vieille femme. - Naissances de garçons et de filles. - De l’amour entre époux. De l’amour entre parents et enfants. Passage du Sébaou. - Village d’Azazga. - Le télégraphe. Les partis politiques à Azazga. - Concessions gratuites. Oisiveté des colons ; les luttes du forum. - L’État-Providence ; rôle des députés. - Le phalanstère de Maillot ; le droit à la pension ; les Saint-Simoniens. - Plan pour le lendemain, une visite. - Un pays de cocagne. - L’absinthe,

- CHAPITRE IV LES FORÊTS DE L’AKFADOU. - L’ISLAMISME, LA FÉODALITÉ. Vendredi 24 juin 1887. - La route ; travailleurs calabrais. - La forêt d’Iacouren. - Les chênes zéens. Le génie militaire. Maison forestière d’Iacouren. - Un garde forestier arabe. - Un grand danger. Le fatalisme et le Coran. - Le mouchatchou ; soins qu’on prend de lui, son vêtement.- Pâturages et troupeaux. Un hameau. Les mulets, - Chênes afarès. Berger en contravention arrêté par Amar ; le procès-verbal. 95 Antipathie entre les Arabes et les Kabyles. - Différences dans l’interprétation du Coran ; les kanouns. Introduction de l’islamisme en Kabylie. Les Arabes et les Kabyles ; les femmes. L’islamisme favorisé ; pèlerinages à la Mecque ; arabisation de la Kabylie et de l’Aurès par l’administration française. - Les Khouans. - Comment on devrait écrire la langue kabyle. 95 Les maraudeurs. Marabout de Sidi-Ladi. - La forêt ; pas d’eau. Nouvelle chute. - Maison forestière de l’Akfadou. - Déjeuner champêtre. - Un assès. Le paysage. - Plan de la journée du lendemain ; palabre avec le tamen et les Kabyles pour avoir des mulets. - Départ d’Amar. - La source ; séance de physique amusante. La promenade. - La vie d’un garde forestier ; l’isolement, l’éducation des enfants, les vivres ; société des Kabyles. - Les voleurs. 95 Les assès. - Le guet d’incendie. Système féodal en Algérie. - Singulier retour au Moyen âge. - Héroïsme de Mme Alexandre. - Installation pour la nuit. - Dernière promenade au crépuscule. Le poste des assès.

- CHAPITRE V DE L’AKFADOU A BOUGIE. LE RETOUR. - LES KABYLES Samedi 25 juin 1887. Le lever, la toilette. - Le départ ; seuls avec trois Kabyles. - Le costume et le langage. - Les chênes afarès. Sommes-nous trahis ? Le Baraquement ; exploitation abandonnée. - Les assès. - La Clairière des scieurs de long. - Le tamen et le parasol. Vue magnifique. - Rencontre de bûcherons. - Carte de la Grande Kabylie ; où sommes-nous ? Macache. - Ruines romaines. - La source, le déjeuner. Nourriture des Kabyles, leur sobriété. Quelle est la meilleure eau. - Appétit kabyle ; marcheurs kabyles - Bordj de Taourirt-Ir’il. Mélodies kabyles. Forêt de chênes liège. - La moitié du chemin. - La chaleur ; incendies de forêts ; responsabilité collective. - L’absinthe chez un piqueur. Route d’El-Kseur à Azazga. -El-Kseur. Changements de noms des villages. - Adieu à nos guides. Climat de la plaine. - La fièvre, le guêpier du Sénégal. - L’Oued Sahel. - Bougie ; vue du golfe et des Babors. Dimanche 26 juin 1887. Climat de Bougie. - Le cap Carbon, son tunnel. - Retour à Alger, par l’Isaac Péreire. 113 Lundi 27 juin. Dellys. Le quartier kabyle. - Mosquée. École des Arts et métiers. Les côtes de la Kabylie. - Alger, carrière de marbre. Fin du voyage. Épilogue : la Kabylie, le pays. - Les habitants. - L’assimilation.


2 Messages de forum

  • HUIT JOURS EN KABYLIE Ὰ TRAVERS LA KABYLIE et LES QUESTIONS KABYLES 20 octobre 2015 07:23, par Pierre né et ayant vécu à Alger

    J’ai lu avec intérêt le document ( 8 jours en Kabylie) et parcouru l’itinéraire de l’auteur en m’aidant de Google Map ; à chaque étape j’ai localisé les lieux visités et regardé les photos correspondantes.

    On peut résumer ce texte très intéressant par la phrase suivante : La France a raté la colonisation et la décolonisation.

    Tout est écrit dans ce texte et l’évolution ultérieure était prévisible dès la fin du 19 è siècle.

    Il y avait une certaine prétention à vouloir « civiliser les sauvages » d’abord parce qu’il n’étaient pas des sauvages, ils avaient des usages qui n’étaient pas les nôtres mais qui étaient tout à fait respectables. Le jacobinisme de la France a fait beaucoup de dégâts. La France aurait pu concevoir une organisation de l’Algérie colonisée sur un mode fédéral selon les ethnies et les régions en fonction de leur caractère en leur laissant une autonomie suffisante et en gardant le contrôle des grandes ville.

    L’agression de la conquête par les militaires qui avaient participé à l’épopée Napoléonienne a laissé les traces qui existaient toujours à la fin de la présence française.

    Malgré tout, il ne faut pas passer sous silence les actions d’éducation qui ont permis l’évolution intellectuelle des artisans de l’indépendance, les actions de santé publique et de soins dont à titre personnel j’ai été le témoin, sans oublier les infrastructures réalisées par la France.


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