Article d’Ivan Rioufol publié dans la rubrique débats opinions du Figaro du vendredi 29 avril 2011.
Le congrès international de médecine sur la méthode Coué, qui se tiendra à Nancy en septembre, étudiera les guérisons liées à l’imaginaire et à l’autosuggestion : deux procédés surexploités en politique. Mais les résultats en ce dernier domaine sont désastreux. Tout ce qui est répété est contredit au quotidien. Or cela n’empêche pas les esprits automatiques de s’arrimer aux dénis du réel en jugeant relaps les contradicteurs. Ce comportement absurde souligne le désarroi des idéologues confrontés à l’effondrement de leurs utopies. Trente ans de pilonnage n’ont cessé de contourner les faits et de prendre les gens pour des imbéciles. Aujourd’hui, cela se voit...
- Ivan Rioufol
Les journaux « progressistes », acteurs du bourrage de crâne, en sont à dresser la liste de ceux (Eric Zemmour, Elisabeth Lévy, Robert Ménard, Eric Brunet, votre serviteur) qu’ils accusent d’accaparer la parole au prétexte qu’ils n’observent pas les codes de la pensée labellisée. Parce que ces cinq-là semblent trouver l’écoute d’une opinion rebelle qui a investi Internet, ils irritent la caste dépossédée de son monopole. Les épinglés seraient réactionnaires, ultraconservateurs, extrémistes. Voire néofascistes ou postnazis, puisque leurs discours se rapprocheraient de ceux des années 1930, comme le récitent des historiens du dimanche : procès authentiquement staliniens, ceux-là.
Cette poignée d’accusés révèle en fait l’intransigeance d’un journalisme militant rejetant le choc des idées. Ce que disent les hérétiques devrait passer inaperçu : ils défendent la liberté d’expression, la laïcité, le modèle républicain. Y voir les signes d’une pensée rétrograde et totalitaire est un non-sens effrayant. Si la démocratie est menacée, c’est par ceux qui en contestent les règles, à commencer par la tolérance. Les mêmes refusent également de protéger le vivre-ensemble, fragilisé par des bouleversements culturels nés d’une immigration de peuplement qu’ils nient.
Car la méthode Coué appliquée à la politique et à l’information ne consiste pas seulement à n’admettre qu’un discours unique. Elle oblige à ne voir que ce qui est autorisé par la doctrine. Les Échos, mardi, en ont donné l’illustration avec un plaidoyer d’une page sur les bienfaits de l’immigration qui allégerait même les comptes sociaux. Dans le même temps, des démographes jonglant avec les mots et les statistiques assurent que les ghettos n’existent pas, que l’immigration n’est pas massive, que l’intégration fonctionne (voir mon blog). Les Français voient que tout cela est faux.
Les vérités de Malika Sorel
La dénonciation la plus percutante de ces mensonges vient d’un livre de Malika Sorel-Sutter (Immigration, intégration, le langage de vérité, Éd. Mille et Une Nuits). Cette Française originaire d’Algérie écrit : « Depuis trente ans, les dirigeants n’écoutent plus qu’une seule voix, celle des antirépublicains. » Pour elle, « l’immigration nuit fortement à l’intégration et même à la simple insertion ». Elle serait la cause d’un processus de « substitution de peuples ». Venue du Maghreb, Sorel fulmine contre la déculturation du monde politique, son mépris de l’histoire de France, de sa littérature. « Lorsqu’on y réfléchit bien, l’indifférence des élites (européennes) à l’existence ou à la disparition de leurs peuples a quelque chose de proprement glaçant ! » Voir les dirigeants se faire sonner les cloches ! par une Française d’origine immigrée, outrée par leurs renoncements, laisse espérer un semblable et réjouissant sursaut dans l’opinion. Si s’indigner de la sorte, c’est être réac, alors il est urgent de le devenir.
Son livre fait d’ailleurs prendre conscience de l’énormité des désinformations mises au service de la vaine méthode Coué, pauvre artifice qui voudrait faire croire qu’il suffit d’obtenir la nationalité pour devenir français, tout en se réclamant de ses différences.
Malika Sorel, membre du Haut Conseil à l’intégration, rappelle, à contre-courant du panurgisme médiatique qui se félicite de la fécondité des Françaises européennes, que le taux de natalité en banlieue est deux fois plus élevé qu’ailleurs, que le chiffre de 200 000 arrivées par an est sous-évalué, que l’immigration a un coût, que les mariages mixtes sont souvent un leurre, que bien des familles des cités rejettent le mode de vie des Européens et l’école républicaine, que les territoires les plus pauvres ne sont pas les banlieues mais la Creuse, l’Aude et le Cantal, etc.Qu’attend l’UMP pour l’entendre ?
Retour au réalisme
La comédie des bons sentiments touche à sa fin. À moins de se ridiculiser davantage, le monde politique ne peut plus recourir aux faux-semblants humanistes utilisés pour méconnaître le réel. C’est dans ce contexte que se pose la réforme des accords de Schengen sur la libre circulation au sein de l’Europe, discutée mardi entre Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi à propos des exodes tunisien et libyen. Au rêve élitiste d’un continent ouvert s’impose aujourd’hui l’exigence des nations et des peuples de se protéger d’une immigration extra-européenne non désirée. Le prévisible rétablissement des frontières, qui rend la gauche sans voix, signe le retour au réalisme en politique. Fin d’une époque ?
Charité instrumentalisée
Quand le Pape, mercredi, exhorte les catholiques italiens à manifester leur « solidarité avec leurs frères migrants » venus d’Afrique du Nord, il prône la charité. Or elle peut être comprise comme une aubaine, ! comme les droits de l’homme quand ils sont instrumentalisés par ceux qui les méprisent. Faut-il rappeler au Saint-Père que l’enfer est pavé de bonnes intentions ?
Article d’Ivan Rioufol publié dans la rubrique débats opinions du Figaro du vendredi 29 avril 2011.
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